Méthanisation: cap sur l'injection !

Délaisser la production d’électricité issue de cogénération au profit de l’injection de biométhane ? Voilà une piste que pourraient suivre les exploitants d’installations de biogaz, selon l’Association suisse de l’industrie gazière (ASIG) et Biomasse Suisse qui ont tenu une réunion d’information ce jeudi 24 mars à Fribourg.

25.03.2022

Les tensions sur le marché du gaz, exacerbées depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie, montrent bien le caractère stratégique de cette ressource. À l’occasion d’une après-midi d’information intitulée «Cap sur l’injection de biométhane» à Fribourg le 24 mars, l’association suisse de l’industrie gazière (ASIG) et Biomasse Suisse se sont associés pour évoquer l’injection de biométhane avec des exploitations d’installations de biogaz agricoles, des distributeurs d’énergie, des représentants de stations d’épuration (STEP), d’autorités communales, de la Société des gaziers de la Suisse romande et d’Ökostrohm Schweiz.

Gabrielle Bourguet, responsable des affaires publiques pour l’ASIG, a d’abord dressé un tour d’horizon des conditions-cadres applicables à l’injection de biométhane, au niveau de la Confédération et à l’échelle cantonale. Ces conditions pourraient évoluer favorablement à l’avenir, compte tenu des motions déposées pour soutenir davantage l’injection de biométhane ou encore exonérer le biogaz de la taxe CO2. Les besoins actuels de la Confédération en gaz naturel s'établissent à environ 40 TWh, dont 5,5 % seulement seraient d'origine renouvelable. Les aspects techniques et économiques relatifs à une conversion d’une installation de production d’électricité et de chaleur en une unité de production de biométhane ont été présentés par Yves Membrez, fondateur et dirigeant du bureau d’études spécialisé EREP. L’expert a notamment insisté sur le niveau élevé de valorisation énergétique dans le cas de l’injection de biométhane. La réunion s’est poursuivie avec une intervention de Frédéric Schulz, directeur distribution gaz auprès des services industriels de Genève, qui a présenté l’exemple de la STEP d'Aïre. Depuis 2013, cette unité qui traite les eaux de 600 000 équivalent habitants injecte entre 0,5 et 1% de la quantité de gaz distribuée dans le canton. Avec l’arrêt programmé du séchage des boues, l’intégralité du gaz sera disponible pour l’injection, soit environ 50 à 55 GWh.

Juliana Leon d’EDJ (Energie du Jura) a ensuite présenté un autre exemple de projet de méthanisation, démarré voici une dizaine d’années et repris par des agriculteurs avec une nouvelle orientation : l’injection de biométhane. Le projet a suivi de multiples pistes de montage juridiques et financiers, ralenti notamment du fait de la construction des installations en zone agricole et de l’incertitude pesant sur la qualité et la quantité des approvisionnements en substrats. S’il n’a pas dû faire face à une réelle opposition de la part de riverais, cet exemple montre clairement la difficulté des porteurs de projets face aux contraintes administratives et aux incertitudes législatives.

Les participants ont par la suite eu l’occasion de visiter la station d’épuration fribourgeoise de Neigles, une unité accueillant les eaux usées de 100 000 équivalent habitants. Dotée d’une unité de méthanisation cette installation produit depuis une dizaine d’années,9,8 GWh/an, dont une partie est injectée sous forme de biométhane dans le réseau, à hauteur de 1% de la consommation en gaz du canton. Le procédé d’enrichissement du biogaz choisi, dénommé PSA ou pressure Swing Adsorption, porte la teneur en méthane de 60% à plus de 96%, le minimum requis pour pouvoir injecter dans le réseau Dans le cas de la STEP de Neigles, cette proportion atteint 98%. Inversement, la concentration en CO2 est divisée par 10 et la teneur en hydrogène sulfuré H2S est elle aussi réduite.

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À SAVOIR : L’ASIG propose aujourd’hui un nouveau projet-pilote, pour l’instant limité aux cantons romands, destiné à encadrer et aiguiller les exploitants d’unités de méthanisation souhaitant s’orienter vers l’injection. Ils sont invités successivement à :

  1. Contacter en premier lieu Gabrielle Bourguet de l’ASIG qui établira un lien avec l’entreprise gazière concernée,
  2. Echanger avec l’entreprise gazière pour décider de la possibilité de collaboration,
  3. Engager une étude de faisabilité, prise en charge à 25% par l’ASIG et 25% par la Société des gaziers romands, le reste à tant à la charge de l’exploitant.

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